(d'après Amnesty International:
https://www.amnesty.fr/liberte-d-expression/actualites/etat-durgence-le-tour-de-passe-passe-pour-le-rendre-permanent)
Photo Journal La Croix 09.02.2016 |
LE CONTEXTE :
Le 12 juillet, l’état d’urgence est entré officiellement en vigueur pour la sixième fois depuis le 13 novembre 2015, prolongeant ce régime exceptionnel jusqu’au 1er novembre 2017. La France aura alors vécu deux ans, soit la plus longue période de son histoire depuis la guerre d’Algérie, sous ce régime d’exception, par définition conçu pour être temporaire et réactif.
Pourtant, de très nombreuses organisations, dont Amnesty International, ont alerté depuis deux ans sur les dérives et abus commis sous l’état d’urgence. Pourtant, de nombreux experts de la sécurité et des parlementaires responsables du suivi de l’état d’urgence ont à de nombreuses reprises alerté sur la très faible efficacité de l’état d’urgence aujourd’hui, et la nécessité d’en sortir.
Las. Le 4 juillet 2017, le Sénat a voté sa reconduction à l’identique, par 312 voix pour et 22 contre. Le 6 juillet, l’Assemblée nationale a fait de même, par 137 voix contre 13. Même les interdictions individuelles de manifester, pourtant censurées par le Conseil constitutionnel le 9 juin 2017 ont été réintroduites dans cette 6ème loi de renouvellement de l’état d’urgence. Les préfets ont donc continué d’interdire à des personnes de manifester, sur des bases très vagues et floues.
UNE LOI POUR RENDRE PERMANENTE LA LOGIQUE DE L’ÉTAT D’URGENCE
Fin juin, le gouvernement a dans le même temps transmis au Parlement un nouveau projet de loi renforçant la sécurité et la lutte antiterroriste. Celui-ci a été adopté en première lecture le 3 octobre par l'Assemblée nationale.
Cette loi, présentée comme permettant de sortir de l’état d’urgence, ne fait en réalité que transposer ses principales mesures dans le droit commun.
Ainsi, le ministère de l’intérieur et les préfets pourront continuer à prendre des mesures restreignant considérablement les libertés : perquisitions, assignations à résidence, fermeture de lieux de culte, pourront être prises sur la foi de simples soupçons peu ou pas étayés des services de renseignement.
Seules les perquisitions (rebaptisées "visites domiciliaires") bénéficieront en principe d’une autorisation préalable du juge des libertés et de la détention.
Les préfets pourront prendre des mesures de fouilles systématiques des personnes et véhicules dans des périmètres déterminés, sans avoir besoin de justifier d’un quelconque motif à l’encontre de la personne visée.
BIENVENUE DANS L’ÈRE DU SOUPÇON
Les personnes visées le seront sur des critères flous, d’appartenance proche ou lointaine à l’entourage de personnes ou d’organisations, ou de simple adhésion privée à des idées, sans exiger la preuve d'avoir commis ou préparé un acte de terrorisme, sans infraction pénale donc.
Quant au contrôle par la justice, il risque, comme pour l’état d’urgence, d’être peu effectif, dans la mesure où les juges auront à se baser sur des motifs flous et des incriminations très vagues pour rendre leur décision.
En rendant permanente la logique de l’état d’urgence, qui est celle du soupçon, cette nouvelle loi antiterroriste produira vraisemblablement les mêmes effets : des mesures abusives, disproportionnées, voire arbitraires, contre des personnes et des groupes, qui peuvent être chacun de nous à un moment ou un autre...
Prenez connaissance de l'analyse détaillée du projet de loi par Amnesty International
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire