dimanche 29 octobre 2017

D’UN HERBICIDE À L’AUTRE OU COMMENT LE DICAMBA EST EN PASSE DE REMPLACER LE GLYPHOSATE


Si vous n’avez jamais entendu parler du Dicamba, soyez rassurés, il arrive à grands coups d’hectolitres, lui et son cortège d’effets collatéraux.


Alors même que la France claironne qu’elle votera contre le prolongement de l’autorisation par l’Union Européenne du glyphosate pendant dix ans, elle précise par la voie du ministre de l’agriculture, Stéphane Travert qu’il n’est pas question de l’interdire immédiatement : « Le Premier ministre m’a chargé, avec mon collègue […] Nicolas Hulot, de trouver les moyens d’établir un calendrier de sortie de ce produit (le glyphosate), le calendrier le plus rapide mais qui devra trouver la bonne trajectoire pour permettre la transition nécessaire, notamment dans les professions agricoles. Cette trajectoire doit permettre aux agriculteurs de diminuer progressivement l’utilisation de cet herbicide. C’est la durée de cette transition que le gouvernement français doit encore trancher. »
Et d’ajouter : « Si on reporte à dix ans et que pendant dix ans on ne fait rien, dans dix ans on sera exactement au même niveau qu’aujourd’hui. Donc, nous devons […] donner les moyens à la recherche de trouver des produits de substitution.»
Il n’y aurait donc selon le ministre Travert qu’une énième solution chimique pour se substituer à un herbicide dont les effets sur la santé sont plus nombreux et plus graves chaque jour. En Auvergne Rhône Alpes une mère vient de porter plainte contre Monsanto accusant son produit phare, le Roundup (à base de glyphosate) d’être la cause des malformations de son enfant. Aux États-Unis des milliers de plaignants souffrant de lymphome accusent Monsanto et le Roundup d’être à l’origine de leur pathologie.
Monsanto se défend sans relâche face à ces accusations qu’il réfute en s’appuyant sur une littérature scientifique riche concluant systématiquement en l’absence de corrélation entre l’exposition répétée au glyphosate et tels ou tels cancers ou malformations. Même l’agence européenne pour la sécurité alimentaire, l’EFSA, ne considère pas le glyphosate comme substance cancérogène se positionnant ainsi à l’opposé des conclusions de l’OMS.
Il semble cependant que le géant de l’agrochimie emploie des méthodes peu recommandables pour obtenir de la communauté scientifique qu’elle produise des études favorables au Roundup. Selon le site Sciences et Avenir outre une rémunération généreuse, les scientifiques se voient proposer et acceptent de signer des articles rédigés par les salariés de Monsanto eux-mêmes. Cette technique est connue sous le nom de ghostwriting en anglais que l’on pourrait traduire en français en écrivains fantômes (ou nègres). Plus rien d’étonnant alors à ce que le glyphosate trouve grâce aux yeux d’une partie de la communauté scientifique comme à ceux de l’EFSA qui base ses conclusions sur les études produites par les industriels comme le révèle l’Obs dans son cahier spécial du 5/10 (voir ici) et The Guardian.
Un problème ne venant jamais seul, les industriels de l’agrochimie, Monsanto et Bayer en tête, font face à un phénomène que beaucoup d’experts avaient anticipé : la résilience de Dame Nature et sa capacité d’adaptation.
Ainsi aux Etats-Unis, après des décennies d’un emploi massif d’herbicides à base de glyphosate, les agriculteurs américains ont constaté leur complète innocuité sur les mauvaises herbes devenues résistantes. Loin de remettre en cause leurs pratiques agricoles, les fermiers ont sollicité les semenciers chimistes pour qu’ils leur proposent une solution de remplacement. Et c’est ainsi qu’entre en piste le Dicamba cité en préambule.
Au dire de ceux qui l’ont testé, pas un seul représentant du règne végétal ne lui résiste. Son pouvoir de destruction serait même jusqu’à 400 fois supérieur au glyphosate (cf. organicauthority) – alléluia.
Bien sûr chaque paysan souhaitant épandre cet herbicide devra au préalable ensemencer ses champs avec des graines génétiquement modifiées pour survivre au Dicamba. Graines que les semenciers vendent à un prix nettement supérieur à celui pratiqué pour celles qui résistaient alors au glyphosate.
Seulement il y a un hic. Le produit miracle s’avère difficile d’emploi : il a une fâcheuse tendance à migrer pour se répandre là où on ne l’attend pas forcément. Et comme Attila, là où il passe l’herbe trépasse.
Ainsi donc le Dicamba sous l’effet de la chaleur et de l’humidité se vaporise : le liquide devient gaz et voyage bien au-delà de sa zone d’épandage. Depuis un an que sa commercialisation est autorisée aux États-Unis, les pertes de production de soja consécutives à un nuage de Dicamba représentent 4 % de la production annuelle américaine. Ce phénomène rencontré dans 21 états américains sur les 30 produisant du soja tend à se généraliser et les plaintes à se multiplier.
Monsanto comme Bayer s’insurgent de telles accusations et cherchent un dérivatif en pointant du doigt les agriculteurs qui seraient la cause de leur propre malheur en ne respectant pas les procédures d’épandage du Dicamba.
« Il faut du temps pour comprendre et maîtriser les nouvelles technologies », dit M. Scott Patridge, un des vices-présidents de Monsanto qui propose d’améliorer la formation des agriculteurs déversant l’herbicide ravageur pour solutionner le problème et disculper son employeur (cf. New York Times).
Nombreux sont les agriculteurs américains à déclarer qu’ils n’ont d’autre choix aujourd’hui que de semer des graines génétiquement modifiées pour résister aux herbicides employés par leurs voisins et ainsi espérer récolter quelque chose, le temps des moissons venu.
Certains agriculteurs victimes du Dicamba vont probablement devoir mettre la clé sous la porte. Comble de leur malheur leurs exploitations seront rachetées aux enchères par ceux-là mêmes qui emploient les semences et herbicides commercialisés par Monsanto (cf. New York Times).
Quel est alors pour le client de Monsanto l’intérêt de poursuivre de telles pratiques agricoles risquées? Apparemment la promesse d’un abaissement des coûts de production et un profit immédiat accru pour lui et Monsanto au mépris des conséquences irréversibles endurées par l’environnement et supportées financièrement et socialement par la société toute entière sur une échelle de temps nettement plus longue.
Que peut-on proposer contre cette folie?
On mesure ici à quel point les politiques de part et d’autre de l’Atlantique ignorent l’urgence écologique en en faisant une question à part alors qu’il s’agit d’une question centrale. C’est autour et à partir de l’écologie que doit se penser la politique de toute la nation.  Le temps de l’écosystème, c’est le temps long. Le temps court de la finance et du productivisme saccage tout. La reconquête du temps long est la principale exigence. C’est le but de la planification écologique : mettre en cohérence dans le temps et dans l’espace les mesures nécessaires pour faire bifurquer le modèle de production, de consommation et d’échanges. Quelques mesures de bon sens s'imposent:
  • Ne pas prélever sur la nature davantage que ce qu’elle peut reconstituer ni produire plus que ce qu’elle peut supporter
  • Consommer autrement : soutenir la création de coopératives de consommation en lien direct avec les producteurs
  • Refuser la brevetabilité du vivant à tous les niveaux 
  • Refuser les OGM, bannir les pesticides nuisibles en commençant par une interdiction immédiate des plus dangereux (glyphosate, néonicotinoïdes, etc.)
  • Sanctuariser le foncier agricole et naturel et lutter contre l’artificialisation des sols
  • Développer l’agriculture biologique, instaurer une agriculture diversifiée et écologique
  • Favoriser les circuits courts, la vente directe, la transformation sur place et plafonner les marges de la grande distribution pour garantir des prix rémunérateurs aux producteurs.
d'après https://insoumislyon.org/

mardi 24 octobre 2017

J'ai peur d'avoir peur!


Un billet de Robert Solé, écrivain et journaliste


Pour nous aider à préparer Halloween, une courte réflexion sur la peur:

"Pour agir, je n’ai pas attendu que cet excité de Donald Trump hausse le ton avec le fou de Pyongyang. 
Avant même la catastrophe nucléaire de Fukushima, j’avais pris contact avec un fabricant d’abris atomiques. Il me proposait un bunker enterré de 27,40 mètres carrés, pouvant accueillir les quatre membres de ma famille, pour 48 000 euros HT. Ce prix comprenait un groupe électrogène, une soupape de décompression, une cuve d’eau de 1 000 litres, des toilettes sèches et un compteur Geiger. Les douches de décontamination étaient en option. 
Mais que se passerait-il en cas d’attaque nucléaire, de menace chimique ou d’éruption solaire de grande ampleur ? Mes voisins me demanderaient certainement l’hospitalité et n’hésiteraient pas à forcer la porte de mon abri. 
J’ai donc préféré acheter un trois-pièces dans un refuge souterrain collectif, construit en un lieu tenu secret. Cette arche de Noé peut accueillir un millier de personnes pendant un an. Elle compte une boulangerie, une piscine, des saunas, une salle de cinéma, un aquarium, et même une banque d’ADN pour repeupler la planète si une terrible catastrophe survenait. 
Cependant, avec angoisse, je constate que le nucléaire n’est pas ma seule source d’inquiétude. Ni d’ailleurs la principale.
J’ai surtout peur du cancer, du sida et de l’Alzheimer. J’ai peur du chômage et d’une nouvelle crise boursière. J’ai peur de l’islamisme, des attentats et d’un nouvel afflux de migrants. J’ai peur des accidents. J’ai peur de la pollution, du réchauffement climatique… J’ai peur d’avoir peur et, pour cela, j’ai bien peur que même Le Bon Coin ne soit pas en mesure de me vendre un abri. "

jeudi 19 octobre 2017

Conseil municipal du 16 octobre: " On a retrouvé le wallaby! "

Début juillet, les habitants de Vaugneray ont remarqué du côté de Chatanay un animal errant un peu particulier... un kangourou! 
Vérification faite, il s'agissait en réalité d'un wallaby, un marsupial d'Australie ressemblant effectivement à un petit kangourou. La bête n'en demeure pas moins exotique dans les Monts du Lyonnais. Pourtant, elle ne s'était pas échappée d'un parc animalier, mais bien de chez un particulier.  Ensuite, plus de nouvelles pendant 3 mois jusqu'à ce que l'animal soit à nouveau signalé du côté de Hoirieu début octobre, a-t-on appris au cours du Conseil municipal du 16 octobre. S'il échappe aux chasseurs et que la température clémente se poursuit, ce wallaby débrouillard a donc des chances de devenir une légende locale.

Le prochain recensement général de la population de Vaugneray va avoir lieu début 2018. Les agents recenseurs qui vont arpenter la commune en tout sens entre janvier  et février prochains vont-ils rencontrer le wallaby? Nul ne le sait, c'est un animal plutôt nocturne, mais les nuit d'hiver sont longues... En tout cas le Conseil municipal a décidé que le barème légal forfaitaire de rémunération des agents recenseurs devait être légèrement augmenté, et l'a passé de 250 euros à 300 euros. Etant donné la lourdeur de la tâche qui incombera à ces 11 agents temporaires (dont le recrutement est en cours), ce n'est que justice.

En veine de générosité et d'innovation, le Conseil municipal a décidé d'acquérir des parts dans la Centrale solaire villageoise de nos vallons CEVIVAL.
Suivant le signal de confiance donné à la Centrale par la CCVL qui a acquis récemment 10 000 euros d'actions de CEVIVAL, le Conseil municipal a décidé l'acquisition de 100 actions à 50 euros soit 5 000 euros. Le retour espéré est de 3% sur 20 ans, mais cette décision marque surtout un engagement fort dans les énergies renouvelables, dont nous nous félicitons. Les particuliers sont incités à faire de même en souscrivant au capital de CEVIVAL. Plus la participation sera élevée, plus CEVIVAL sera en position forte pour négocier les emprunts bancaires nécessaires à ses investissements. le lien pour souscrire à CEVIVAL

Parmi les autres délibérations importantes de ce 16 octobre, il faut noter:

- le dépôt de permis de construire pour l'extension de la salle des fêtes et de la MJC: malgré la bonne intégration du projet dans l'urbanisme de la commune, malgré les améliorations incontestables apportées à ces équipements anciens, Union Pour l'Avenir et un autre conseiller municipal se sont abstenus lors du vote. Les arguments qui motivent notre abstention sont les suivants:
- la population n'a pas été consultée sur l'opportunité de ce projet, et on aurait pu tout aussi bien délocaliser la salle des fêtes en dehors du village et/ou  trouver un emplacement nouveau pour la MJC (îlot Perrachon?)
- on ajoute 85,5 m² à la salle des fêtes et 65 m² à la MJC, ce qui fait en gros 150m² pour un coût initial estimé à 1,2 millions d'euros HT! Ce qui est très, très, très cher du m²...
- victimes collatérales du projet: Art'Scène est annulé en 2018, et le fonctionnement de la MJC sera très fortement perturbé jusqu'à fin août 2018 

- un avenant au marché public concernant la navette Venet de 16 places qui contribue à nous relier au monde extérieur depuis la disparition des TCL: ce marché intégrera dorénavant une formule de révision de prix, avec pour conséquence que les avenants ne passeront plus en Conseil municipal mais seront signés directement par le maire! Le coût est actuellement de 199,30 € HT, soit 219,23 € TTC par jour, avec une TVA de 10%! 
Commentaire: le maire a refusé d'inclure le prix TTC dans la délibération, craignant sans doute qu'un seuil psychologique soit franchi au-delà de la barre symbolique de 200 € par jour... Il a cependant accepté que la mention d'une TVA à 10% soit portée dans la délibération... Union Pour l'Avenir s'est abstenu de voter cette délibération!

- la ressourcerie Val'Trions va bénéficier d'un bâtiment modulaire à la Baviodière, implanté par la commune, ce qui est une très bonne décision. Le montant des travaux est de 61 700 €, pour lesquels le Conseil municipal a demandé une subvention aux instances européennes. Bien sûr, nous avons voté sans réserve cette demande de subvention .



- l'USOL foot a fait réaliser une économie de 702 € cette année à la commune à force de discipline et de vigilance sur la consommation d'électricité du stade et des vestiaires. Par convention, le Conseil municipal attribue une subvention de la moitié de cette somme à l'USOL foot, soit 301 €.

-  la participation du Conseil municipal est confirmée pour la scolarité d'un élève en difficulté qui ne peut être scolarisé à Vaugneray en primaire, mais est accueilli en ULIS à St Martin-en-Haut (254 € pour l'année scolaire 2016-2017)

- modification des statuts de notre syndicat de rivières, le SAGYRC: il s'agit de prendre acte de l'application de la réforme territoriale initiée en 2014. Pour la compétence principale du syndicat - gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations pour l'Yzeron, le Rattier et le Charbonnières - les délégués au syndicat ne représenteront plus les communes. Ils seront issus des communautés de communes (CCVL pour ce qui nous concerne) et de la Métropole. Pour les compétences secondaires, il restera bien un délégué par commune mais avec une seule voix, alors que la Métropole aura 10 délégués et 60 voix, la CCVL 6 délégués avec 3 voix chacun, etc... Les communes sont ainsi remplacées petit à petit par les communautés de communes, dans une évolution qui se précipite.

- observations de la Chambre Régionale des Comptes sur la gestion de la CCVL: Le rapport souligne la bonne gestion d'ensemble de la CCVL et formule 5 recommandations principales:
-les comités consultatifs devraient être ouverts à des personnes compétentes et non pas uniquement aux conseillers municipaux des communes membres
-les compte-rendus de toutes les commissions doivent être systématiques
-la mutualisation des services doit se poursuivre activement, en particulier concernant les ressources humaines des communes
-la gestion du centre de loisirs à Thurins doit être attribuée selon la procédure des marchés publics
-la gestion de l'immobilier de la crèche La Pirouette à Vaugneray doit être transféré à la CCVL sous la forme d'une mise à disposition. Commentaire: le rapport de la Chambre régionale des comptes concernant la commune de Vaugneray n'est pas encore connu. Sans nul doute, cette recommandation y figurera également. 

Par contre, le rapport de la Chambre régionale des comptes pour la CCVL ne mentionne pas la gestion du personnel de la crèche. C'est une anomalie. Nous pensons depuis longtemps que la gestion globale de la crèche de Vaugneray, service public, échappe également à la  procédure des marchés publics, et qu'il faudra tôt ou tard, comme pour le restaurant scolaire, procéder à une remise en ordre. 
Le lien pour consulter le Rapport de la Chambre régionale des comptes sur la CCVL 

Les autres délibérations votées le 16 octobre sont purement administratives: création d'une régie de recettes pour l'encaissement des loyers communaux, décision modificative au budget, admissions en non-valeur pour des créances non recouvrables ou des créances éteintes, vote d'un tarif à 1,50 € pour un abonnement temporaire d'un mois à la médiathèque...

En fin de séance, Union Pour l'Avenir a remis sur le tapis la question de l'extinction totale ou partielle de l'éclairage public la nuit, entre minuit ou 1H et 5H du matin, suivant en cela ce qui se fait déjà à Messimy, Grézieu, Brindas, Yzeron et Thurins. Lorsque nous avons parlé de cela en juillet, le maire avait parlé d'évoquer le sujet en commission générale. Le 16 octobre, il ne souhaite plus en parler qu'en commission "voirie" où le débat sera forcément plus technique et plus restreint... Et si nous n'avions rien dit, il n'en aurait même pas été question! On est loin de la réunion publique qu'il faudrait organiser sur le sujet...
le point sur l'extinction de l'éclairage nocturne dans nos vallons

Prochaine réunion de Conseil municipal lundi 20 novembre. Réunion publique ouverte à tous, bien sûr - mais sans droit de parole pour le public! 20H30 en mairie.N'hésitez pas venir y assister, vous passerez à coup sûr une bonne soirée et vous apprendrez beaucoup...

jeudi 12 octobre 2017

Pourquoi l’industrie de la charcuterie s’entête à nous faire avaler des produits cancérogènes

Daprès 
En France, plus de 40 000 nouveaux cas de cancers colorectaux sont diagnostiqués chaque année. Parmi les causes de cette maladie : la consommation de charcuteries enrichies en nitrites. Ces additifs alimentaires, utilisés massivement par les industriels, donnent à la viande une jolie couleur rosée et augmentent leur durée de consommation. 
En dépit de leurs graves conséquences sanitaires, la plupart des fabricants rechignent à y renoncer. Et préfèrent gagner du temps en mettant en doute les preuves médicales et scientifiques. 
Une stratégie qui rappelle celles des industries du tabac ou des pesticides, affirme Guillaume Coudray, auteur de Cochonneries, une enquête sur le sujet.
Cochonneries, éditions La Découverte, 270 pages, 18€.
Entretien.
Votre ouvrage commence par un épisode clé dans l’histoire des charcuteries : en octobre 2015, elles sont déclarées « cancérogènes pour l’homme » par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ). Ce qui rend nombre de charcuteries industrielles cancérogènes, c’est l’addition de nitrite de sodium (E 250) ou de nitrate de potassium (E252). De quand date l’utilisation massive de ces additifs ?
Guillaume Coudray [1] : Ces additifs se sont surtout développés et imposés aux États-Unis, dans la seconde moitié du 19ème siècle, à mesure que se mettait en place l’industrie des charcuteries, l’une des premières du pays. Les quantités de cochons abattus transformés deviennent peu à peu gigantesques. Les additifs « nitrités » [contenant du nitrite de sodium, ndlr] disposent d’un grand avantage : ils donnent systématiquement une coloration homogène et uniforme à la charcuterie – un joli rouge rosé. Ils permettent ainsi d’obtenir des jambons visuellement satisfaisants à partir de cochons jeunes et peu exercés, idéal pour l’élevage industriel.
Les additifs permettent aussi d’accélérer la fabrication de charcuteries, qui demandent normalement de longues périodes de maturation, et de conserver la viande plus longtemps. Bref : ils diminuent les pertes, accroissent les volumes et font baisser les prix. Ils sont tellement avantageux que leur usage est devenu, partout ou presque, la norme. En France, où 70 % du porc consommé l’est sous forme de charcuterie, les sels nitrités ont été autorisés en 1964.
Au début du 19ème, on ne connaît que le nitrate de potassium, c’est-à-dire le salpêtre. Puis on commence à utiliser le nitrate de sodium qui provient d’immenses gisements découverts dans les déserts d’Amérique latine, au pied des Andes. Permettant un rougissement plus rapide, il recueille la faveur des charcutiers industriels américains. Au début du 20ème, un produit encore plus actif fait son apparition : le nitrite de sodium. Pendant la première Guerre mondiale, des chimistes allemands mettent au point des procédés qui permettent la synthèse du nitrite de sodium afin d’alimenter l’industrie et l’armement, en particulier les usines métallurgiques. Le nitrite de sodium devient abondant et peu coûteux. Au départ interdit par les services sanitaires, car considéré comme un poison – il est mortel à partir de 2g/kg –, le nitrite est progressivement autorisé partout, sous forme de sels nitrités, de sorte que la dose susceptible d’entraîner une intoxication directe n’est jamais atteinte.
Comment découvre-t-on que ces nitrites peuvent entraîner des cancers colorectaux ?
À la cuisson, lors de la digestion ou dès la fabrication, les nitrites font apparaître d’autres substances : les nitrosamines et les nitrosamides, qui sont cancérogènes : elles font apparaître des tumeurs. C’est ce risque qui a été dénoncé par le Centre international de recherche sur le cancer en 2015. Mais dès 1968, le journal médical anglais The Lancet expose ce problème, déjà étudié par des chercheurs. Deux ans plus tard en 1970, les cancérologues disposent de preuves suffisantes pour accuser les charcuteries d’être responsables d’un nombre considérable de cancers.
L’autre risque des nitrites, c’est qu’ils activent le pouvoir cancérogène du fer et le transforment en puissant promoteur des tumeurs, via un phénomène appelé la nitrosylation du fer. Ce risque-là, très grave, n’est pas encore pris en compte par les autorités sanitaires. Malheureusement, les scientifiques qui travaillent sur le sujet sont assez timides et ne disent pas assez fort ce qu’ils savent, ou bien on préfère ne pas les entendre.
Combien de personnes sont concernées par le cancer colorectal ?
Le cancer colorectal est l’un des plus répandus et des plus meurtriers. En France, 42 000 cas sont découverts chaque année et 42 % des personnes atteintes de ce cancer en meurent, soit 17 700 décès par an. En Europe, ce sont 152 000 personnes qui en meurent chaque année, et dans le monde, près de 700 000. Entre 5 et 10 % de ces cancers sont d’origine génétiques. Les plus touchés par le cancer colorectal sont les pauvres. Or ce sont eux qui consomment les produits les plus nitrités : rillettes, jambon, saucisson. Ce sont les produits les moins chers qui en contiennent le plus. Au rayon libre-service des supermarchés, un ménage modeste achète deux fois plus de charcuteries qu’un ménage aisé. Les plus grands consommateurs sont les agriculteurs et les ouvriers. Précision importante : les charcuteries "bios" ne sont pas nécessairement sans nitrites. En France, seuls deux labels privés, Déméter et Nature et Progrès, garantissent l’absence de nitrites. La seule solution, c’est d’inspecter les listes d’ingrédients et de bannir les charcuteries bio colorées au nitrite.
Pour justifier l’usage des nitrites, les industriels brandissent les risques de botulisme. Cette maladie mortelle est due à une bactérie qui se développe à cause du manque d’hygiène, quand les produits sont mal cuits, mal fumés ou conservés dans de mauvaises conditions. Vous dites qu’il s’agit là d’une « mise en scène ». Pourquoi ?
Ce risque « botulisme » apparaît dans les discours et documents des charcutiers industriels américains à la fin des années 1960, avant d’arriver en en France. C’est une réponse à la problématique des cancers qui émerge. Ils brandissent le botulisme comme un épouvantail pour faire avaler la pilule des nitrites : on fait croire aux gens que les nitrites servent à les protéger des risques de botulisme alors que c’est pour la couleur, pour le goût et prolonger la date limite de consommation. Il y a une tromperie fondamentale. Toutes les études et les experts le disent : les causes de cette maladie, c’est l’absence de soins et la viande avariée, pas l’absence de nitrites. La plupart des industriels le savent parfaitement. Pour ne rien changer au système qui a fait leur fortune, certains industriels de la charcuterie vont s’enfoncer dans le mensonge.
Comment se présente ce mensonge ?
On retrouve dans leurs stratégies les mêmes ficelles que dans les affaires de l’amiante, du tabac ou des pesticides. Ils utilisent tous le même « guide de voyage du truqueur en santé publique ». Ainsi, depuis le début des années 1970, un petit groupe de chercheurs financés par l’industrie américaine de la charcuterie a produit une quantité considérable de publications destinées à mettre en doute l’effet cancérogène des viandes nitrées. Ils expliquent que les cancers sont des maladies complexes, qu’elles ont toutes sortes de causes, ils exagèrent la responsabilité individuelle...

Les industriels n’hésitent pas non plus à réinventer l’histoire. Peu après la diffusion d’une émission de Cash investigation sur les dangers des nitrites, des industriels français ont ainsi mis en ligne une vidéo qui prétend qu’on utilise des nitrites depuis la nuit des temps. C’est exactement ce que racontent les industriels américains, ce qu’ils répètent en permanence. Ils nous font croire que la pratique du nitritage est aussi vieille que l’invention des jambons et des saucissons, alors qu’il n’en est rien. Les recettes anciennes montrent que les charcuteries ont longtemps été fabriquées avec du sel et du poivre, rien de plus. Longtemps, le salpêtre puis les nitrites étaient considérées comme des curiosités et utilisés de manière anecdotique.

L’Agence sanitaire européenne (European food safety authority, EFSA), habilitée à réguler les additifs dans les charcuteries consommées dans les pays membres, contribue à brouiller les cartes...
L’EFSA, connue pour les conflits d’intérêt qui règnent en son sein, pourrit le débat scientifique. Elle créée des comités bidons qui ne servent qu’à semer le doute et obtenir des délais pour ne rien changer. En alliée fidèle des charcutiers industriels, l’EFSA fixe des « taux maximum » de nitrite tout en reconnaissant qu’ils ne tiennent pas compte des effets cancérogènes des métabolites du nitrite. À l’image des charcutiers, elle est intarissable sur les dangers du botulisme de façon à justifier son inaction.
Produire autrement de la charcuterie propre à la consommation est-il possible ?
La seule vraie solution, pour écarter ce risque de cancer, c’est de fabriquer des charcuteries sans nitrites ni nitrates. C’est possible, les fabricants des jambons de Parme l’ont prouvé, en renonçant dès 1993 à l’usage de nitrites et de nitrates. Ils sortent 9 millions de jambons par an et n’ont pas eu un cas de botulisme en 25 ans ! Leur processus prend plus de temps et demande plus de soins. Il faut respecter des règles d’hygiène strictes et mettre en place de longues périodes de réfrigération et de maturation. Cela oblige à adapter l’outil de production : changement des machines et des équipements de réfrigération, révision des processus de fabrication. Tout cela aurait un coût, bien sûr.
Il faudrait aussi revoir la filière en prenant des viandes de meilleure qualité, plus mûres. Les fabricants qui renoncent aux additifs nitrés utilisent généralement du cochon qui a entre 12 à 18 mois, contre 6 mois dans les grandes industries charcutières. Il s’agit de transformer les modes de fabrication pour aller vers des productions plus locales, plus raisonnables, plus vertueuses. Ce que ne permettent pas les nitrites : des cochons de mauvaise qualité, il faut produire vite ; les conditions de travail des producteurs de cochon sont difficiles ; celles des ouvrières et ouvriers dans les usines de transformation sont infernales... 
Il s’agit en fait de remettre à l’endroit un système pourri où tout marche à l’envers.


vendredi 6 octobre 2017

ÉTAT D'URGENCE : LE TOUR DE PASSE-PASSE POUR LE RENDRE PERMANENT

(d'après Amnesty International: 
https://www.amnesty.fr/liberte-d-expression/actualites/etat-durgence-le-tour-de-passe-passe-pour-le-rendre-permanent)

Photo Journal La Croix 09.02.2016
LE CONTEXTE :

Le 12 juillet, l’état d’urgence est entré officiellement en vigueur pour la sixième fois depuis le 13 novembre 2015, prolongeant ce régime exceptionnel jusqu’au 1er novembre 2017. La France aura alors vécu deux ans, soit la plus longue période de son histoire depuis la guerre d’Algérie, sous ce régime d’exception, par définition conçu pour être temporaire et réactif. 
Pourtant, de très nombreuses organisations, dont Amnesty International, ont alerté depuis deux ans sur les dérives et abus commis sous l’état d’urgence. Pourtant, de nombreux experts de la sécurité et des parlementaires responsables du suivi de l’état d’urgence ont à de nombreuses reprises alerté sur la très faible efficacité de l’état d’urgence aujourd’hui, et la nécessité d’en sortir.
Las. Le 4 juillet 2017, le Sénat a voté sa reconduction à l’identique, par 312 voix pour et 22 contre. Le 6 juillet, l’Assemblée nationale a fait de même, par 137 voix contre 13. Même les interdictions individuelles de manifester, pourtant censurées par le Conseil constitutionnel le 9 juin 2017 ont été réintroduites dans cette 6ème loi de renouvellement de l’état d’urgence. Les préfets ont donc continué d’interdire à des personnes de manifester, sur des bases très vagues et floues.

UNE LOI POUR RENDRE PERMANENTE LA LOGIQUE DE L’ÉTAT D’URGENCE

Fin juin, le gouvernement a dans le même temps transmis au Parlement un nouveau projet de loi renforçant la sécurité et la lutte antiterroriste. Celui-ci a été adopté en première lecture le 3 octobre par l'Assemblée nationale.
Cette loi, présentée comme permettant de sortir de l’état d’urgence, ne fait en réalité que transposer ses principales mesures dans le droit commun.
Ainsi, le ministère de l’intérieur et les préfets pourront continuer à prendre des mesures restreignant considérablement les libertés : perquisitions, assignations à résidence, fermeture de lieux de culte, pourront être prises sur la foi de simples soupçons peu ou pas étayés des services de renseignement.
Seules les perquisitions (rebaptisées "visites domiciliaires") bénéficieront en principe d’une autorisation préalable du juge des libertés et de la détention.
Les préfets pourront prendre des mesures de fouilles systématiques des personnes et véhicules dans des périmètres déterminés, sans avoir besoin de justifier d’un quelconque motif à l’encontre de la personne visée.

BIENVENUE DANS L’ÈRE DU SOUPÇON

Les personnes visées le seront sur des critères flous, d’appartenance proche ou lointaine à l’entourage de personnes ou d’organisations, ou de simple adhésion privée à des idées, sans exiger la preuve d'avoir commis ou préparé un acte de terrorisme, sans infraction pénale donc.
Quant au contrôle par la justice, il risque, comme pour l’état d’urgence, d’être peu effectif, dans la mesure où les juges auront à se baser sur des motifs flous et des incriminations très vagues pour rendre leur décision.

En rendant permanente la logique de l’état d’urgence, qui est celle du soupçon, cette nouvelle loi antiterroriste produira vraisemblablement les mêmes effets : des mesures abusives, disproportionnées, voire arbitraires, contre des personnes et des groupes, qui peuvent être chacun de nous à un moment ou un autre...


dimanche 1 octobre 2017

CETA : "C'est le quasi-suicide de notre agriculture !"

CETA : "C'est le quasi-suicide de notre agriculture !"
C'est pas qui nous le disons, mais la FNSEA, la Confédération nationale de l'élevage, les Jeunes agriculteurs, etc., etc..., en Commissions des affaires économiques de l'Assemblée nationale.
Or le CETA, traité de libre-échange économique entre l'Europe et le Canada, est entré en vigueur le 21 septembre malgré la contestation et les appels au président de la République...

Son accord frère, le TAFTA, traité de libre-échange économique entre l'Europe et les Etats-Unis, nous pend au nez. Car malgré ce qu'on aurait pu penser après l'élection de Donald Trump, l'administration américaine y croit encore... Voir ci-dessous quelques conséquences du TAFTA, selon France Nature Environnement: 


L’instauration de droits exceptionnels au bénéfice des entreprises étrangères, ou encore l'intrusion des lobbies industriels dans la préparation des lois menacent la capacité des pouvoirs publics à décider de politiques au service de l'intérêt général.

Les dommages sur les normes sociales, environnementales et climatiques, les droits des travailleurs et des consommateurs, la santé, les services publics, la diversité culturelle ou encore les filières agricoles seront irréversibles.Des millions de citoyen.ne.s et des centaines de collectivités territoriales à travers l'Europe les refusent.

Informons-nous! 

https://www.collectifstoptafta.org/
http://ecoacteur.fondation-nicolas-hulot.org
http://www.fne.asso.fr/
etc...