lundi 16 mai 2016

Les jeunes, le monde politique et la société : une fracture ouverte

d'après Le Courrier des Maires 4 mai 2016 Marion Esquerré

Une récente enquête Ifop sur le comportement électoral des 18-25 ans montre que la défiance des jeunes à l'égard du personnel politique n'a pas faibli. Ils s'estiment toujours aussi peu pris en considération dans les discours et dans les actes.

A un an de l’élection présidentielle, l’Association nationale des conseils d’enfants et de jeunes (Anacej) publie sa quatrième enquête consacrée au comportement électoral des jeunes de 18 à 25 ans.
L’Ifop, en charge de cette étude, les a questionnés sur :
  • leurs intentions de vote,
  • la perception qu’ils sont de leur situation et de leur avenir
  • et le bilan qu’ils font de la politique Jeunesse du gouvernement.

Tentation de l’abstention

Bien que largement meilleure que celle mesurée à l’abord des élections régionales de décembre dernier, l’intention de participation à la prochaine élection reste faible. Elle s’élève à 48% pour un scrutin qui traditionnellement mobilise plus que les autres.
Pour expliquer leur possible abstention, 20% des interrogés évoquent comme première raison leur mécontentement à l’égard des partis politiques. Au total, 34% à avancer ce motif.
Pour 18% des interrogés, c’est d’abord l’absence de candidat défendant ou représentatif de leurs idées qui les éloignent des urnes. Mais au total, ils sont 33% à évoquer ce motif.
Enfin, 11% des interrogés expliquent qu’ils ne comptent pas voter car l’élection ne changera rien à leur situation. Ils sont tout aussi nombreux à expliquer leur non-participation par leur désintérêt de la chose politique.

Des partis et des candidats rejetés

Certaines candidatures pourraient-elles favoriser la mobilisation des jeunes vers les urnes ?
Si les candidatures d’Emmanuel Macron (36%) et de Marine Le Pen (34%) les inciteraient à aller voter plus que celles de Nicolas Sarkozy ou Alain Juppé (32%) ou encore de Jean-Luc Mélenchon (28%), Nicolas Hulot et François Fillon (26%), François Bayrou (24%) ou François Hollande (23%), le facteur « candidat » a en réalité peu d’influence.
En revanche, lorsque les jeunes expliquent pourquoi les candidatures des deux premiers les inciteraient à aller voter, ils évoquent majoritairement « leurs idées et programmes » et surtout le fait qu’ils « renouvellent la vie politique ».

Le choix de l’alternance à droite

Interrogés sur leurs intentions de vote au premier tour, en fonction de plusieurs hypothèses chez les écologistes (Duflot ou Hulot), les socialistes (Hollande ou Valls) et les républicains (Sarkozy, Juppé ou Le Maire), les jeunes donneraient à la droite (LR, Modem, Debout la France) entre 29 et 35%.
Alain Juppé a une côte plus importante auprès des jeunes que ses challengers. Face à la droite républicaine, le FN de Marine Le Pen arriverait au second tour chez les jeunes avec entre 27 et 35% des intentions de vote. En troisième position, la gauche du PS (LO, NPA et FdG), avec Jean-Luc Mélenchon comme principal catalyseur de voix, oscillerait entre 19,5 et 23% des votes.
Le PS semble la variable la plus stable, en quatrième position, avec entre 13 et 15% d’intention de votes. Enfin, les écologistes verraient leur score varier entre 2,5 et 3%, avec une pointe à 8% en cas de candidature de Nicolas Hulot.
Quant au second tour, qu’elle soit en face d’un candidat Les Républicains (avec une longueur d’avance pour Juppé) ou de Hollande (mais avec seulement 4 points en moins),Le Pen perdrait chez les 18-25 ans.

Mauvais bilan pour Hollande

La quatrième et dernière partie de l’enquête évalue le satisfecit des jeunes à l’égard de la politique Jeunesse menée par le gouvernement.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est très mauvais. Ils ne sont que 19% à se dire satisfaits. Ils estiment qu’ils n’ont pas été associés aux réformes qui les concernaient (78%) et qu’ils n’ont pas été entendus dans leurs revendications (81%).
Cependant, seuls 41% d’entre eux ont entendu parler de la politique « Priorité jeunesse », même si, en réalité, interrogés mesure par mesure, une majorité d’entre eux connaît l’existence de la création des contrats d’avenir et de génération, du plan de développement de l’apprentissage ou de la création d’un droit universel au Service civique.
Les mesures qui touchent au porte-monnaie – garantie jeunes et création de nouveaux échelons de bourses étudiantes – sont étonnamment moins bien connues (respectivement par 42 et 35% des interrogés). Dans l’ensemble, toutefois, les 18-25 ans interrogés estiment que toutes les mesures évoquées par l’enquête dans le cadre du plan « Priorité jeunesse » vont dans le bon sens.
Ce qui n’empêche pas 85% d’entre eux de considérer que François Hollande n’a pas tenu sa promesse : faire en sorte que les jeunes vivent mieux à l’issue de son mandat qu’en 2012.

Révoltés, oubliés et mal vus

L’enquête fournit, dans sa troisième partie, les éléments les plus intéressants pour comprendre leur état d’esprit.
A un an des élections et à l’heure du bilan du mandat de Hollande, les jeunes se disent « révoltés » (48%) face à la société française et plus d’un quart (27%) se déclarent « résignés ».
Ils ne sont que 8% à se dire « confiants » et 5% à se montrer « enthousiastes ». Il faut dire que 68% d’entre eux déclarent s’en sortir difficilement avec les revenus de leur foyer.
Ils ne sont que 48% à s’imaginer mieux vivre que leurs parents dans une dizaine d’années. 30% estiment que leur situation sera moins bonne et 22% qu’elle sera équivalente à celle de leurs aînés.
Enfin, 57% des 18-25 ans interrogés sont insatisfaits de leur place dans la société.Pour 76% d’entre eux, la société ne leur accorde pas de place pour qu’ils réussissent leur vie professionnelle.
Globalement, les jeunes pensent avoir une mauvaise image auprès de la société en général (62%) et plus particulièrement auprès du personnel politique (72%), des responsables de recrutement et de RH (62%) ou encore des médias (60%).
Finalement, selon eux, ils ne trouveraient grâce – enfin, à 49% – qu’aux yeux … des personnes âgées.

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