jeudi 27 mars 2014

Pauvres élus d'opposition !



(recueilli pour vous sur France-Info le 16 février 2014)
Lors des prochaines municipales, il y aura des vainqueurs, mais aussi des perdants.  Des élus d'opposition qui ont beaucoup moins de droits que dans les autres démocraties européennes. 

Depuis la décentralisation, nous disposons en France de très nombreux pouvoirs locaux. Le problème est que nous n'avons pas créé en même temps beaucoup de contre-pouvoirs locaux. Dans les conseils municipaux, par exemple, les élus de l'opposition n'ont pas vraiment les moyens de jouer efficacement leur rôle. Contrairement à ce qui se passe dans d'autres démocraties européennes.
Partant de constant, une sénatrice écologiste, Hélène Lipietz, prépare une proposition de loi sur ce sujet. Elle y suggère, par exemple, de permettre aux élus minoritaires de pouvoir s'exprimer plus largement dans les colonnes des bulletins municipaux, qui ressemblent souvent à des mini-Pravda locales.
Elle demande que les élus minoritaires puissent être informés au moins 8 jours à l'avance des sujets qui viendront en discussion au prochain conseil municipal, au lieu de 5 actuellement. La différence est plus grande qu'il n'y paraît : cela leur permettrait de disposer d'un weekend pour les préparer sérieusement, ce qui changerait tout pour des élus qui, le plus souvent, exercent un métier par ailleurs.
Hélène Lipietz considère également que l'opposition devrait pouvoir décider d'une partie de l'ordre du jour du conseil municipal, comme c'est le cas à l'Assemblée nationale avec ce que l'on appelle les niches parlementaires. Elle souhaite même qu'un maire puisse être révoqué au cours de son mandat s'il fait l'objet d'une motion de défiance de son conseil municipal.
Mais sa proposition la plus spectaculaire est celle-ci. Elle propose de séparer, dans les mairies, le pouvoir législatif du pouvoir exécutif. A Paris, les membres du gouvernement ne siègent pas à l'Assemblée nationale. De la même manière, le maire et ses adjoints ne devraient plus, selon elle, faire partie de l'assemblée délibérante. Dans son esprit, cela éviterait au conseil municipal d'être relégué au rang de chambre d'enregistrement. Elle imagine même qu'il puisse y avoir deux élections séparées : l'une pour le maire, l'autre pour le conseil municipal, afin que celui-ci dispose d'une légitimité propre et contrôle vraiment le pouvoir exécutif de la commune.
Très surprenantes pour un Français, ces mesures sont en réalité banales en Europe. Elles existent en Italie, en Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas. Mais autant le dire tout de suite : elles n'ont quasiment aucune chance d'être adoptées chez nous, en tout cas à court terme, et Hélène Lipietz en a tout à fait conscience. En cause, notamment, le cumul des mandats : plus de la moitié des parlementaires dirigent eux-mêmes un exécutif local. Ils n'ont évidemment aucune envie de voter une loi qui renforcerait les droits de leur opposition .
A moyen terme, en revanche, il faut peut-être se montrer plus optimiste. A partir de 2017, la nouvelle loi sur le non-cumul  des mandats commencera à s'appliquer. Et les cumulards disparaîtront peu à peu du Parlement...

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