vendredi 27 juin 2014

Réflexion pour un weekend: Et si on travaillait moins pour travailler tous?

Ci-dessous la synthèse d'un atelier sur le partage du temps de travail, mené à Lyon le 5 juin par le Collectif Roosevelt:
http://collectif-roosevelt.fr/actu/atelier-semaine-de-4-jours/

Le partage du temps de travail est une idée simple et séduisante pour certains, un projet utopiste pour d’autres, sans oublier ceux qui n’ont jamais entendu parler de cette solution. Interrogeons-nous sur la faisabilité d’une telle mesure qui bouleverserait à coup sur les schémas traditionnels d’organisation du travail.






Partons d'un constat : la situation économique ne permet pas de résorber le chômage, la croissance est faible, les déficits brident les capacités d’actions des États et le chômage massif produit une population de plus en plus marginalisée.

Pourquoi une répartition plus juste du temps de travail permettrait-elle de résoudre les problèmes de chômage ?

Prenons l’exemple d’une entreprise qui embauche 100 salariés qui travaillent à 35h. Avec la redistribution du temps de travail, cette entreprise pourrait embaucher 109 salariés à 32h. A plus grande échelle, cela permettrait de passer de 25,8 millions de salariés à 35h à 28,2 millions de salariés à 32h : ce qui engendrerait une diminution de 2,4 millions de chômeurs.

D'après les expériences passées, un schéma de 4 jours travaillés est le plus à même de permettre une création massive d’emplois. Mais ce choix nécessite une réorganisation forte des entreprises comme des emplois du temps des salariés, au profit d’une troisième catégorie que sont les chômeurs et les précaires. La société est-elle prête à cet effort ?

Tout ça c’est bien beau mais qui va payer ?

En fait, nous payons déjà très cher un chômage de masse, tant au niveau humain: divorce, violence, alcoolisme, suicide,qu'au niveau économique, en indemnisations et aides diverses.
Aujourd’hui, si on impose aux entreprises de payer tout ou partie d'un passage à 32h, elles ne créeront pas les emplois prévus et compenseront ces surcoûts par des baisses de coûts de production (restrictions salariales, délocalisations, gains de productivité…).
De la même façon, si on demande aux salarié-e-s de payer , ils refuseront majoritairement.

Donc cette mesure doit s’autofinancer pour être réalisable. Au total une baisse de 12 points de cotisation est nécessaire pour neutraliser les surcoûts pour les entreprises. Il s’agit d’un jeu à somme nul puisque que les taux individuels baissent mais ils sont compensés par une hausse du nombre de cotisants.

Les organismes receveurs (Pole emploi, Sécu…) comme les payeurs ne sont pas pénalisés car in fine les sommes payées et collectées sont les mêmes… mais avec une baisse du nombre de chômeurs.

Comment lutter contre l’effet d’aubaine ? En effet, si les baisses de cotisations ne sont pas compensées par un niveau suffisant de création d’emplois … l‘effet d’aubaine peut tuer la semaine de 4 jours! 

La baisse des cotisations doit être impérativement conditionnée à la création d’emplois, et ce grâce à l’accord préalable des employeurs, des salaries et le tout garanti par l’État (ou une troisième partie). 

La contractualisation de ces accords et à la mise en place de sanctions fortes et dissuasives pour les entreprises et les salaries qui ne respectent pas le contrat est essentiel pour éviter cet effet d’aubaine.

Comment créer une dynamique autour du passage à la semaine de 4 jours ?

Pour inciter les partenaires sociaux à s’engager dans cette démarche, le passage à la semaine de 4 jours serait : 
  • OPTIONNEL : de façon à éviter tout blocage des “anti” qui livreraient un combat de principe. L’option permet de supprimer les blocages les plus forts des “anti” qui pensent que cela peut mettre en danger leur entreprises ou leur emplois.
  • BONIFIE pour inciter les entreprises et les salarié-e-s à franchir le pas. L'incitation peut-être financière (baisse de cotisation patronale et salariale supérieure au surcoût), mais elle peut être aussi qualitative : souplesse, accès privilégiés à des services…

Le cas particulier des PME ?

Concernant les TPE-PME qui rassemblent près de 50% des salariés français, la difficulté d’une mise en place d’un partage du temps de travail au sein de petites structures serait facilitée par une législation favorisant le temps de travail partagé entre plusieurs entreprises, par une attractivité grandissante de ces entreprises pour embaucher (hôtellerie, restauration etc), par des mesures de bonification et par des conditions de travail plus motivantes pour les parties,

CONCLUSION

Le temps global travaillé en France sera le même, c’est la distribution de ce temps de travail qui change : plutôt que d’avoir des travailleurs travaillant beaucoup et des chômeurs, des précaires et des temps partiels très réduits, il serait possible de faire travailler les chômeurs, les précaires et les temps partiels et de moins faire travailler les autres.

La compétitivité ne se verrait donc pas touchée, elle en serait même bonifiée si l’on prend en compte les gains indirects (absentéisme réduit, motivation, productivité, …).En effet, la réduction du temps de travail est un gain de qualité de vie pour ceux qui reprennent place dans la société et leur famille : elle permet une diminution du chômage via des créations d’emplois tout en redynamisant l’économie.

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